Après une exposition des différentes approches du « politique » et du « pouvoir » dans la pensée occidentale et un rappel de l’ambivalence des images qui peuvent à la fois servir à légitimer et à contester les pouvoirs, à « fonder l’obéissance » et à « nourrir la conscience citoyenne », Omar Carlier commente le programme du colloque en ce qu’il permet la comparaison au plus proche et au plus lointain dans l’ensemble africain.

Sa contribution repose surtout le problème de la représentation visuelle du vivant au Maghreb. Pratiquée depuis près de huit mille ans, refondée aux temps romains et byzantins des cultes impériaux, cette représentation connaît une « rupture majeure avec l’islamisation » de ces contrées : « l’image du vivant » en « disparaît quasiment ». Dans cette énigme, « ni l’islam, ni l’arabité ne donne la clé » puisque parallèlement en Orient, une culture de l’image se maintient pour le moins dans les cercles dirigeants ottomans ou persans.

L’arrivée des Français en 1830 à Alger fait surgir un nouveau problème : la « rencontre entre une culture iconoclaste » dominée et une « culture iconophile » dominante. Chaque espace, chaque strate sociale de l’Afrique du Nord s’adapte alors à son rythme, à la nouvelle donne. En Algérie, la culture de l’image semble « glisser » sur la population musulmane jusqu’aux années 1880 ; le rôle de l’image dans la construction d’une identité politique est acquis vers 1930 notamment  dans la jeunesse citadine. Reste alors une difficulté : comment représenter son passé sans « s’en remettre à des images de soi construites par l’autre » ? Comment une culture de la représentation peut aujourd’hui être contestée par des islamistes alors que les réformistes musulmans de la période coloniale y faisaient référence ?